Les membres d’Ende Gelände, une organisation militant pour la sortie des énergies fossiles, ont fait irruption dans une mine à ciel ouvert au sein d’un des plus grands gisements européens de charbon. Récit de cette journée de désobéissance civile.
Blocage de la mine de charbon de Hambach la veille de l'ouverture de la COP23, par des activistes d'Ende Gelände.Arrivée dans la mine de charbon de Hambach. Les activistes d'Ende Gelände sont divisés en 5 équipes, appelées "Fingers". Ici la "Green Finger".
« Ce matin, j’irai bloquer la mine pleine de charbon avec deux mille copines. Ce matin, j’irai bloquer le train plein de charbon avec deux mille copains »… C’est sur l’air de l’Arlésienne de Bizet que les activistes d’Ende Gelände se rassemblent à quelques kilomètres de la mine allemande de Hambach, décidés à bloquer l’extraction la veille de la COP23. À une cinquantaine de kilomètres au Nord-Est de Bonn, un chapelet de mines à ciel ouvert constitue l’un des plus gros sites de production en Europe. Pour la seule mine de Hambach, 40 millions de tonnes sont extraites tous les ans.
Carte d'action de la mine de Hambach. L'entrée se fera par le Sud
Une action risquée
Les militants le savent : un arrêt de quelques-unes des excavatrices qui tournent en trois-huit se compterait en milliers, voire dizaines de milliers de tonnes non extraites. L’impact ne serait donc pas seulement symbolique et médiatique.
Au milieu de la foule vêtue de combinaisons blanches, quelques discrets drapeaux de couleur indiquent les points de ralliement pour les cinq groupes d’action. Les groupes rouge, vert, orange et doré, constitués chacun de 350 à 500 personnes, visent des objectifs différents. Le groupe bleu guidera la manifestation officielle qui servira de couverture aux autres. Ils pourront ainsi s’approcher le plus près possible, avant de faire irruption dans la mine.
Il est 10 heures, sur la place devant la gare de Buir, et la foule se met en mouvement. La mine de Hambach est à quatre kilomètres, qui seront parcourus en rangs serrés. Les risques encourus sont connus par tous : instabilité du terrain, violation de propriété privée… La majorité des activistes ont fait le choix d’y aller anonymement, sans papiers d’identité. Seul un numéro de téléphone inscrit au marqueur sur la peau les rattache aux bénévoles du soutien juridique en cas d’arrestation.
Descente d'Ende Gelände dans la mine de charbon de Hambach, dans le but de bloquer la production (Allemagne)
Passage sous la "convoy belt" en rampant
Premier passage, première victoire Le rythme s’accélère à proximité de la mine. Un premier cordon de policiers barre l’accès. L’information circule par gestes entre l’avant et l’arrière. Poing fermé : serrez les rangs ; mains ouvertes : dispersez-vous ; bras en croix : ne poussez plus. Les retardataires se mettent à courir pour serrer les rangs, puis un mot d’ordre part : dispersion ! La colonne compacte vole en éclat. Les policiers ne sont pas assez nombreux pour s’interposer. Les cris de victoire et de ralliement se font entendre. On se compte. Aucune arrestation n’est à déplorer. Quelques centaines de mètres plus loin, la mine se dévoile en contrebas. Il est 12h30, les machines sont à l’arrêt. Après cinq heures de marche et d’attente, cela sonne comme une première victoire.
Une fois à l’intérieur, il faut agir rapidement. À deux cents mètres, le tapis roulant convoyant le charbon forme le prochain objectif : « Il y a un trou profond de deux mètres devant nous, si vous ne le sentez pas, n’y allez pas ! » Les activistes s’approchent et beaucoup hésitent quelques secondes avant de sauter. Le sable friable des parois rend l’ascension malaisée, mais un ou deux points plus érodés permettent une échappatoire. Il faut immédiatement reprendre la course et franchir le tapis roulant. Ceux qui sont restés derrière lancent des clameurs d’encouragement et de victoire.
Blocage de la mine de charbon de Hambach la veille de l'ouverture de la COP23, par des activistes d'Ende Gelände.Excavatrice de charbon, mine de Hambach. Le mouvement du groupe est ralentit. L'hésitation apparait face aux forces de l'ordre.
Excavatrice de charbon, mine de Hambach. Les plus grosses excavatrices du monde mesurent 220 mètres de long par 96 de haut, soit la taille d'un immeuble de 30 étages.
Police montée, militants bloqués Au loin se dresse l’excavatrice. Un monstre métallique de deux cents mètres de long qui semble de plus en plus écrasant à mesure que l’on s’approche. À son pied, une centaine de policiers, matraques sorties, dos aux barrières, semblent plus déterminés que les précédents. Un moment d’hésitation parcourt le groupe.
Que décider ? Doit-on se disperser ou faire bloc ? Les militants d’Ende Gelände sont en train de perdre l’initiative et les conditions météorologique se dégradent. Le ciel se couvre, le vent se lève et balaye le sable de la mine. La pluie froide commence à tomber. Imperceptiblement, les forces de l’ordre profitent de ce moment pour resserrer les rangs et bloquer les issues – à commencer par l’accès aux niveaux inférieurs. La police montée commence à repousser les premiers cercles et, dans un mouvement pour se dégager, un cheval piétine un homme.
La fatigue monte, la lumière baisse, la fin approche. Les forces de l’ordre font une annonce par haut-parleur, autorisant les enfants, les femmes enceintes et les blessés à évacuer. Ils invitent également les personnes détentrices de papiers d’identités à être exfiltrés.
la journée se terminera par l'immobilisation des militants et leur expulsion de la mine. Très peu d'arrestations ont eu lieu, les forces de l'ordre n'ayant pas les moyens d'arrêter et d'identifier autant de personnes.
Blocage de la mine de charbon de Hambach la veille de l'ouverture de la COP23, par des activistes d'Ende Gelände.Un homme blessé suite à une charge des forces de l'ordre
Marqueurs et super glue
L’annonce est répétée et, signe de la solidarité qu’Ende Gelände a réussi à tisser entre ses membres, personne n’a bougé. Seule la personne blessée par le cheval a été évacuée. Certains s’assoient, sortent les couvertures de survie, consomment leurs dernières provisions. L’attente commence. Dans les rangs, la super glue et les marqueurs commencent à circuler. La première rend illisible les empreintes digitales et les seconds permettent de se "défigurer" pour prendre en défaut certains systèmes de reconnaissance faciale.
L’ampleur de la tâche pour la police est énorme. Il y a probablement près de sept cents personnes à placer en garde à vue sur ce seul site, sans compter qu’une autre excavatrice a été arrêtée dans la mine. Les policiers finissent par renoncer et annoncent qu’ils vont évacuer tout le monde après avoir photographié les visages.
Il est près de 19h lorsque les derniers activistes sont reconduits. La fatigue gagne les corps, mais il faut encore rentrer. Quelques kilomètres de marche supplémentaire sont nécessaires pour rejoindre la gare. Les regards se croisent, les sourires naissent, la satisfaction d’avoir réussi rend le retour plus facile. Loin du charbon, les premières cigarettes de la journée brûlent d’une braise rouge dans la nuit. « On recommence quand ? »
Article paru dans le magazine Regards (web) le 22/11/2017 Texte et photos B.Larderet
Au-delà de l’esthétisme de l’extrêmement petit et du règne animal, ces photographies ont pour ambition de faire retrouver une fascination pour les êtres vivants que nous côtoyons tous les jours mais que nous ne savons plus voir. Contre l'amnésie environnementale qui gagne une population se sentant toujours plus profondément extraite de sa condition naturelle, ces photographies visent à sensibiliser le public avec le corps animal et la diversité de ce qui nous entoure. La protection de la nature ne s'arrête pas aux animaux exotiques mythiques et symboliques, comme le lion, l'ours blanc ou la baleine bleue, mais elle commence bel et bien à notre porte, dans les interstices du béton ou sous les roues de nos voitures.
Cette série est un hommage aux populations qui disparaissent, un rite funéraire offert aux individus rencontrés, un cri d'impuissance face à l'ampleur du désastre et une déclaration d'amour au règne animal.
Bien évidemment, aucun animal n'a été blessé, tué ni contraint lors de la réalisation de cette série.
Locale, bon marché, avec un impact environnemental faible, la terre crûe, utilisée depuis des millénaires, revient
peu à peu en tant que matière première. Coup d’oeil dans le Nord Isère où une filière se structure.
Pisé,
bauge,
adobe
ou
torchis,
les
techniques
de
constructions
en
terre
crûes
sont
multiples. Chaque technique requiert
une
terre
aux
caractéristiques
bien
particulière,
plus
ou
moins
argileuse,
plus
ou
moins
granuleuse. Comme elle est extraite localement, l’observation
de
l’habitat
traditionnel
dans
votre
région
vous
donnera
un
indice
décisif
sur
les
qualités
de
votre
terre.
La terre crûe, en opposition à la terre cuite (comme les briques traditionnelles) ont un bilan énergétique bien meilleur lié à l'absence de cuisson, à l'origine locale et à l'absence de production de déchet.
Enduit en terre recouvrant une isolation en paille.
Principalement
utilisée
aujourd’hui
dans
la
rénovation
du
bâti
ancien,
elle
présente
toutefois
une
alternative
intéressante
qui
revient
petit
à
petit
au
goût
du
jour.
Certains
architectes, comme Martin Rauch
se
réappropriant
notamment
le
pisé,
dont
la
texture
à
la
fois
lisse
et
granuleuse,
l’aspect
brut
et
le
ton
chaud,
correspond
assez
bien
aux
goûts
contemporain.
Eco-construction en terre crue. TorchisLa nature collante de la terre argileuse est la texture recherchée pour le torchis. Le piétinement de celle-ci permet d'intégrer la paille au mélange.
En
Isère,
un
département
où
l’habitat
traditionnel
est
beaucoup
basé
sur
le
pisé,
la
terre
crûe
est
poussée
par
des
militants
convaincus,
avec
à
leur
tête
le
laboratoire
de
recherche
CRATerre
de
l’école
d’architecture
de
Grenoble
(ENSAG),
Suivis
de
près
par Amàco
(pour
Atelier
Matière
À
Construire),
qui
met
en
avant
un
projet
pédagogique
et
des
formations
basées
sur
les
matériaux
durables
et
locaux.
À
quelques
kilomètres
de
là,
le
Domaine
de
la
Terre,
ce
quartier
construit
dans
les
années
1980
est
une
expérimentation
grandeur
nature
des
différentes
techniques
de
constructions
en
terre
crûe.
Construction en pisé (Amàco) Batiment en adobe et pisé.
Aux portes des grandes villes, les enjeux environnementaux sont de taille. L’artificialisation des sols impacte la flore et la faune aussi sûrement que le réchauffement climatique. Le Conservatoire Botanique National a annoncé il y a un an, que 23% de la flore est menacée en Rhône-‐Alpes.
24h naturalistes de la FRAPNA, inventaire de la biodiversité à Chatillon d'Azergue.
Un état des lieux précis des écosystèmes est nécessaire pour connaître celles avec lesquelles nous cohabitons. L’inventaire naturaliste est la première étape pour la protection de la biodiversité. Il permet de savoir où sont les espèces remarquables et quelle est la dynamique des populations.
« 23% de la flore est menacée en Rhône-Alpes »
C’est
dans
ce
cadre
que
la
FRAPNA*
à
mis
en
place
l’un
de
ses
événement
annuel,
les
24H
naturalistes.
Une
action
qui
consiste
à
rassembler
une
30aine
d'amateurs
et
professionnels
de
spécialités
complémentaires
(botanistes,
entomologistes,
…)
dans
le
but
d’inventorier
les
espèces
rencontrées,
étudier
le
terrain
et
effectuer
en
24h
un
premier
échantillonnage
de
la
biodiversité
pour
identifier
des
espèces
remarquables
qui
n’étaient
pas
suspectées
sur
un
terrain
donné.
Une tente blanche éclairée par des néons permet d'attirer les papillons de nuit pour faire l'inventaire des différentes espèces présentes aux alentours.
Au-‐delà
de
cet
évènement,
ce
sont
les
initiatives
de
la
FRAPNA
pour
le
suivi
naturaliste
qui
pourront
être
documentés,
avec
notamment
le
comptage
de
mammifères,
pièges
photographiques
et
affuts,
pour
inventorier
la
grande
faune.
Que faire de cet encombrant héritage radioactif produit par les centrales nucléaires? Depuis 50 ans, quasiment 50 000 mètres cubes de déchets nucléaires à moyenne ou haute activité à vie longue ont d'ores et déjà été produits en France. Et ils resteront dangereux pendant des dizaines, voire des centaines de milliers d'années. Aujourd'hui la solution retenue est l'enfouissement profond, le stockage en couches géologiques profondes.
Laboratoire pour l'enfouissement de déchets nucléaires. (Bure)Laboratoire de l'ANDRA à Bure, enfouissement de déchets nucléaires.Le très bon documentaire Into Eternity aborde le sujet d'Onkalo, le tombeau nucléaire finlandais. La difficulté est bien sûr d'assurer la sécurité sur ce type de site. Une des plus épineuses question est d'empêcher l'infiltration d'eau qui corrode les paquets nucléaires et se charge en radioactivité puis ruisselle. En Allemagne, dans les mines de sel d'Asse conçues pour stocker des déchets nucléaires de faible et moyenne activité, le problème se pose déjà. Au USA également, dans un centre de stockage de déchets radioactifs d'origine militaire (WIPP, au Nouveau Mexique) deux incidents consécutifs eurent lieu en 2014, dont un relâchement de particules radioactives dans l'atmosphère, 15 ans seulement après l'inauguration du site. La quasi impossibilité d'assurer une stabilité sismique sur un laps de temps sans commune mesure est un risque supplémentaire. D'autant plus que les calculs de risques sismiques reposent sur l'analyse des risques estimés passés, alors que la fracturation hydraulique pour l'exploitation du gaz de schiste provoque de nombreux séismes de faible intensité aux USA. il est impossible de garantir qu'aucune action humaine ultérieure ne viendra rompre l'équilibre géologique local. Dés lors, comment pouvons nous être sûr de la sécurité à long terme de ces sites?
Centrale nucléaire du Bugey, vue depuis la nécropole archéologique de Larina.
A l'échelle de ces risques, étant donné le volume de déchets accumulés en 50 années seulement pour un stockage jusqu'à 100 000 ans, la fission nucléaire apparait vraiment comme une énergie du XXème siècle, trop lourde de conséquences pour les bénéfices engrangés. Chaque pays nucléarisé devra gérer ses propres déchets : USA, France, Royaume-Uni, Allemagne, Chine, Japon, Russie, etc. Autant d'enfouissements selon les normes de chacun, autant de trous profonds qui devront rester sûrs pour une durée sur laquelle nous n'avons aucun recul...